Forcément, il manquera le « clochard céleste », avec son visage de dandy usé, teint massala, et son aura d’improbable Bouddha des rues de Goa. C’est dans cette ancienne colonie portugaise de la côte sud-ouest que Slow Joe, le crooner au flow minimaliste, fut (re)découvert par le guitariste lyonnais Cédric de la Chapelle, en 2007, lors d’un road trip avec sa douce. Un coup du hasard, un heureux « accident », qui allait accoucher d’un des groupes les plus enthousiasmants de cette décennie. Entre Joseph Manuel Da Rocha, dit Slow Joe, né en 1943 à Bombay, fan d’Elvis et de blues-rock occidental, et le « rouquin » (ginger) du gang des Lyonnais, adepte du punk-rock qui bastonne, le mariage n’était pas garanti. D’ailleurs, si Slow Joe, jeune homme, n’avait pas été éconduit par la famille d’une jeune promise hindoue, peut-être n’aurait-il jamais rejoint les plages de Goa pour négocier pour les touristes le prix des chambres d’hôtel. Peut-être n’aurait-il pas échappé aux drogues et à l’alcool. Frappé par la vérité nue des mélopées blues de Joe l’Indien, le Lyonnais l’enregistre sur une machine de fortune, puis, de retour en France, passe deux ans à écrire le premier album (maxi « Slow Joe Meets The Ginger Accident » en 2010, puis l’album « Sunny Side Up » en 2011) de ce combo hors normes aux sonorités rhythm’n’blues, soul et rock garage. En 2009, Slow Joe & The Ginger Accident se produit pour la première fois sur la scène des Transmusicales de Rennes. Passé l’effet de surprise, le groupe cartonne partout où il passe et déferle sur les ondes radios. Un conte de fée qui pourrait inspirer producteurs de Bollywood. Le 28 mars, le Ginger Accident rendra hommage au poète vagabond disparu en mai dernier, alors qu'ils finalisaient leur 3ème album, « Let me be gone » (Musique Sauvage/ PIAS, sorti en février). So long, Slow Joe.
28/03/2017 – Le Café de la Danse Paris 11